Phoenix garden

Urbanisme et botanique, urbanisme et préservation de l’environnement, des sujets qui ne font pas toujours bon ménage en Occident. À Londres, au détour de quelques rues animées, pour ne pas dire bruyantes, une belle surprise, celle d’un lieu calme, accueillant et gratuit, le Phoenix Garden.

Fondé en 1984, le Phoenix Garden est un jardin communautaire situé dans le centre de Londres, en Angleterre, à St Giles derrière le Phoenix Theater, dans le quartier de Camden. Le jardin fut installé sur un ancien parking, qui lui-même fut avant cela le site de nombreuses résidences. Le Phoenix Garden a survécu à divers défis et c’est le seul des sept jardins communautaires de Covent Garden à avoir subsisté à ce jour, les autres ayant été pour la plupart transformés, cela afin de devenir des espaces commerciaux. D’une certaine manière, on peut à juste titre affirmer que c’est un patrimoine à préserver. Le Phoenix Garden continue d’être géré par un comité de bénévoles composé de résidents locaux et de travailleurs, dont Chris Raeburn le jardinier.

Chaque dimanche, les volontaires se rassemblent. Certains d’entres eux apportent leurs gants de jardinage, d’autres une Thermos de thé chaud. Ces matinées de jardinage sont aussi synonymes de moments de partage.  Échanges de paroles, de conseils, de livres et parfois même de jeunes pousses de plantes d’intérieurs. Ici, chacun jardine en gardant à l’esprit qu’il n’a pas de mauvaises herbes, pas besoin d’eau et pas de déchet. Une approche fondée sur la conviction que les jardins doivent naturellement avoir besoin de peu d’entretien et ne pas inquiéter les jardiniers. Le reste de la semaine, et tout au long de l’année, le Phoenix Garden est un espace idéal pour s’asseoir, manger et discuter. C’est également un lieu de vie pour un large éventail d’animaux sauvages, d’oiseaux, d’abeilles et surtout pour les seules grenouilles du West End Londonien. 

Chris nous annonce avec joie que le Phoenix Garden a remporté le premier prix du meilleur jardin environnemental du concours Camden in Bloom à six reprises. Le Phoenix Garden organise également des événements sociaux réguliers, y compris le très populaire Annual Agricultural Show, où les enfants des villes, ainsi que les plus grands, ont la chance d’en apprendre davantage sur les plantes et la préservation de la nature. Ce festival offre, entre autres, des conseils au sujet des plantes à privilégier dans les jardins afin de soutenir la présence des abeilles. Le secret ? Les plantes mellifères, telles que le mélilot blanc ou encore la cameline.

En 2014, Gurmeet Sian de Office Sian Architecture & Design fut nommé architecte pour le nouveau bâtiment du jadin. Les travaux de construction ont débuté en novembre de la même année et furent achevés un an plus tard, en novembre 2015. Ce nouvel édifice communautaire est constitué de briques, de chêne britannique et de contreplaqué en bouleau. Gurmeet explique que ce projet avait de nombreux défis mais également de belles opportunités, c’est ainsi qu’ils ont choisi d’opter pour un design et une esthétique permettant de souligner la beauté du jardin en l’encadrant d’une façon qui attire l’attention sur lui de manière positive. Avec autant d’immeubles avoisinant le jardin, le nouveau bâtiment communautaire devait avoir une forte présence urbaine, tout en étant sensible à son milieu immédiat. Celui-ci a été décrit comme étant « tranquillement monumental », ce qui reflète cette double esthétique.

Et avant tout, le bâtiment devait être construit de manière à ne pas nuire à la vie végétale existante ou aux habitats de la faune du jardin, jouant sur un principe de jardin caché

L’emplacement lui-même est un site de bombardement de la Seconde Guerre mondiale : le sol, de par sa condition, était donc un partenaire de travail difficile. Et avant tout, le bâtiment devait être construit de manière à ne pas nuire à la vie végétale existante ou aux habitats de la faune du jardin, jouant sur un principe de « jardin caché ». Une arche suggère ici non seulement une entrée, mais aussi un jardin. Le toit vert de la structure augmente la surface de plantation du jardin de 90m2. Ce qui, en ville, est considérablement apprécié. Des caractéristiques telles que : les pompes à chaleur, les murs préfabriqués super-isolés, l’utilisation des eaux grises et la collecte des eaux de pluie, furent conçues avec le concept de durabilité comme force motrice clé.

Quand nous avons parlé de la présence de la flore par rapport à son travail, Gurmeet s’attarde sur la collaboration étroite avec Chris Raeburn. Les zones de propagation des plantes sur le toit du bâtiment ont été conçues pour permettre une solution robuste et durable. Gurmeet nous confie que son rôle en tant qu’architecte du Phoenix Garden Community Building, a approfondi sa compréhension de notre relation à la nature et aux jardins en particulier. Dans nos sociétés contemporaines, beaucoup d’entre nous vivons en milieu urbain, où l’accès aux parcs et à la nature peut être quelque peu limité, alors même que les jardins de villes ont l’un des rôles des plus importants pour trouver la paix et ce même lors d’une pause déjeuner d’une demi-heure.

Les jardins de villes nous aident à comprendre notre rôle aux côtés de la nature, l’importance de sa préservation et de son respect au quotidien. Le jardin peut aussi être synonyme de rencontres, de faire ensemble. En 1950, 79% de la population vivait dans les villes au Royaume-Uni et ce chiffre devrait atteindre 92% d’ici 2030. Le contraste entre l’urbain et le rural, dans un lieu tel que Londres, attire l’attention, presque telle une douce rêverie. C’est une tragédie que de nombreux jardins municipaux aient disparu en Angleterre. Le jardin, le lieu de vie qu’est le Phoenix Garden s’enracine dans la ville, et grâce à lui les citadins croisent des papillons aux détours d’une journée chargée. Espérons qu’avec ce nouveau bâtiment et la passion de l’équipe du Phoenix Garden, de nombreuses saisons partagées défileront encore et toujours au cours des prochaines années.

 

Journaliste
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Johanna Tagada
Johanna est une artiste interdisciplinaire basée à Londres. Sa pratique recèle souvent des messages écologiques, partagés par le biais de méthodes douces et délicates.

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